On le sent partout dans tous les échanges au travail, au marché, dans toutes les sphères de la société : les revenus, le salaire, le pouvoir d’achat c’est la préoccupation centrale du moment. Le récent sondage IFOP est éclairant. Il montre que plus d’un Français sur 2 s’en sort tout juste, s’en sort mal ou très mal. D’autres études sont encore plus révélatrices du mal vivre comme celle qui révèle que pour une majorité de français il faudrait en moyenne 300 € de plus par mois pour vivre décemment.
Plusieurs raisons à ce constat : le chômage de masse et la précarisation qui mine le pays ; la modération salariale érigée en dogme pour « réduire le coût du travail » depuis la crise de 2007. (Même s’il faut noter la relative capacité de résistance de la France sur le niveau des salaires). Il est aussi le résultat de l’affaiblissement de l’industrie française qui a toujours joué un effet d’entraînement salarial vers le haut, ainsi que d’une transformation profonde du salariat de plus en plus tertiairisé, éclaté. Enfin se rajoute l’inflation des prix en particulier sur les dépenses pré-engagées et incompressibles des ménages, en particulier des plus pauvres : loyers, transports, assurances, accès aux études des enfants…Le service public a la française qui a toujours joué un rôle redistributif dans notre pays, peine lui-même aujourd’hui, face au capitalisme dominant à assumer cette fonction essentielle.
Le deuxième enseignement de l’étude IFOP est qu’à l’évidence la perception de l’électorat sur le pouvoir d’achat est différente selon la proximité électorale (et certainement sociologique pour une grande part-CSP+) des Français. Le sentiment de s’en sortir bien ou très bien culmine à 60 % dans l’électorat de LREM et LR. Effet idéologique de la recomposition politique en cours, certainement.
Le dernier enseignement du sondage IFOP est de loin le plus intéressant. 75% des Français ne font pas confiance à Macron pour améliorer leur pouvoir d’achat. L’immense majorité des Français a intégré que le « logiciel Macroniste » niait la question centrale du pouvoir d’achat, pourtant essentielle a leurs yeux. Cette contradiction ne cesse de s’aiguiser. Du fait de l’aiguisement des difficultés sociales elles mêmes. Mais aussi parce que les annonces de bons résultats qui se succèdent interrogent à juste titre les citoyens: « l’embellie économique », le « redressement spectaculaire des marges des entreprises », « progression de leurs bénéfices » et singulièrement ceux des groupes du CAC40… La France va mieux, disent-ils, alors pourquoi cela n’irait-il pas mieux pour les Français eux-mêmes ?
Le pouvoir d’achat semble être le tendon d’Achille de la majorité présidentielle. (Certains disent le sparadrap de Macron). Il est, à tout le moins, un combat politique en devenir pour les forces sociales, les forces de gauche si elles s’en saisissent et savent y répondre. Il faut pour cela être créatifs dans les propositions a mettre sur la table, imaginatifs dans l’animation du débat d’idée et politique, audacieux et déterminés pour rassembler très largement tous celles et ceux qui veulent avancer dans ce sens.
Le pouvoir d’achat, la lutte des inégalités, la répartition des richesses ont toujours été LES marqueurs de la gauche. Pour le Parti communiste, les communistes il y a un là un champ ouvert pour une construction dynamique, une offensive et une reconquête politique. Un champ pour un communisme politique vivant et profondément renouvelé, qui s’appuie sur les contradictions qu’illustre ce sondage, et surtout en saisit les potentialités pour faire cheminer les débouchés politiques rassembleurs dans les conditions d’aujourd’hui.
Julien RUIZ