Ce que nous pensons, ce que nous voulons.

Mémorandum de Communisme-et-politique (http://communisme-et-politique.org )

Nous, initiateurs de ce texte, voulons un Congrès du PCF qui soit vraiment extraordinaire. C’est-à-dire un congrès à la hauteur des problèmes posés à la société française et à nos concitoyens et concitoyennes, à la hauteur des questions posées sur l’existence même d’un parti communiste en France.

La crise du capitalisme structure la mondialisation de manière profondément négative et dangereuse pour l’immense majorité des femmes des hommes et des peuples, pour le devenir de l’humanité. Face aux défis d’un monde en plein bouleversement nous vivons un immense affrontement sur les choix et les solutions. Les choix capitalistes provoquent des catastrophes humaines et économiques, écologiques, creusent les inégalités, accroissent les dangers de confrontations et de guerre, de mise en concurrence des peuples et de rivalités de puissance, alimentent les poussées nationalistes et xénophobes. Ce moment dangereux est aussi celui de formidables opportunités. Dans le même temps, se manifestent de nouvelles aspirations à la démocratie et de vives résistances parmi les peuples, les organisations très diverses, les institutions internationales comme l’ont montré les réactions à la crise de 2008 avec « Occupy Wall Street » et les mouvements anti-austérité, les Printemps arabes, les avancées de la COP21 ou la pression internationale pour l’interdiction des armes nucléaires pour s’en tenir à quelques exemples. Les dogmes du libéralisme, du « tout-marché » et du « libre-échange » sont ébranlés. Cette contradiction entre dominations et dégâts du capitalisme et aspirations et potentialités nouvelles est intimement perçue par l’immense majorité des citoyens et traverse toutes les mobilisations de la periode. C’est dans cette contradiction qu’un chemin de « dépassement » du capitalisme est a construire.

En France, nous vivons un énorme paradoxe. C’est au moment où la crise est perçue – même de manière confuse – comme une crise de système, où le capitalisme sous sa forme financiarisée, mondialisée, est interrogé, contesté, que les forces de gauche s’effondrent. La social-démocratie bien sûr , mais aussi, tout particulièrement, le parti communiste qui devrait être la force politique la plus déterminée dans l’analyse critique du capitalisme et dans l’affirmation d’une alternative historique d’émancipation humaine.

La question du bilan des directions du PCF dans les échecs cuisants et l’effacement progressif de celui-ci n’est pas une question de polémique mais une question politique centrale. Alors même que s’ouvre un espace politique au communisme, ce bilan reflète le renoncement des directions à incarner un démarche et une stratégie communiste moderne, enracinée dans la réalité contradictoire de la période, utile aux dynamiques sociales, aux attentes citoyennes. Nous voulons construire-reconstruire un PCF véritablement utile aux salariés – salariées, à la très grande majorité de notre peuple qui a besoin de plus d’emplois, et d’emplois qualifiés, de salaires plus décents, d’une éducation de qualité et d’une formation plus qualifiante pour profiter pleinement des progrès de la civilisation et des opportunités positives que peut ouvrir la mondialisation.

Les développements des mouvements sociaux, la contestation de l’offensive libérale du pouvoir et face au Medef, interpellent la capacité à ouvrir une perspective politique, à répondre à la formidable demande d’unité. Il s’agit dès maintenant de prendre les initiatives fortes, visibles, audacieuses, pour une dynamique unitaire, à gauche, face à Macron, et pour un « après-Macron ». Il s’agit de mettre en débat, entre forces politiques, sociales, de gauche et de progrès, et les citoyens, les grandes mesures modernes, d’avenir. Moins à partir d’un programme – aussi parfait soit-il – que de propositions de portée politique en phase avec des exigences sociales et démocratiques portées par les mobilisations. En phase avec des attentes exprimées – dans les luttes, comme dans le débat d’idées, des expériences citoyennes, nationales, locales. La plate-forme unitaire des syndicats des cheminots est l’exemple de cette possibilité de porter des propositions de haut niveau, en relation avec un mouvement réel. Le développement des initiatives pour une réelle égalité des femmes, pour le respect, montre le potentiel existant. Le Parti communiste devrait prendre des initiatives unitaires concrètes pour faire avancer le rapport de forces en faveur de l’économie sociale et solidaire, du numérique libre, d’un secteur public modernisé et renforcé.

Le Congrès du PCF se déroule de fait, dès maintenant, dans des décisions prises par la direction, sous la pression des événements, et anticipant le congrès lui-même, alors que les communistes (adhérents ou pas) ont été meurtris par l’effacement du PCF et aspirent à un débat ouvert, à de profonds changements. C’est le cas dans la manière dont est abordé le mouvement social. Nous sommes de fait sous la pression de la stratégie de la France Insoumise au lieu de promouvoir le soutien au plus près, en bas, des luttes et propositions des salariés et des organisations syndicales. Il s’agit de contribuer avec la volonté d’avancer dans la construction dynamique unitaire attendue. Mettre la politique au service du mouvement, et non le contraire selon les vieilles conceptions, dans la richesse de ses développements, à l’opposé de son instrumentalisation populiste. Ce choix est à l’ordre du jour.

Concernant l’Europe, nous restons dans un discours attentiste sur les élections européennes, sur la constitution d’une liste qui rappelle la préparation des dernières élections présidentielles au lieu de s’engager dès maintenant sur des propositions et une liste prenant en compte les grands intérêts de la France et du peuple français, et pour changer l’Europe.

Concernant l’avenir du parti communiste et de ses alliances, nous assistons à trois approches politiques. Une, qu’on appellera « conservatrice », proposant essentiellement le « retour aux fondamentaux » idéologiques et organisationnels, y compris dans la fidélité à l’idée du « socialisme » comme « étape » vers le communisme. Une seconde dans la continuation de la constitution d’un « pôle de radicalité » rassemblant la « gauche de la gauche » pour faire pièce à l’hégémonie du parti socialiste, et intégrant une composante communiste. C’est dans cette logique que s’est inscrite la stratégie des années 2000, jusqu’à la crise du Front de gauche, et qui marque encore les choix actuels.

Nous metttons en discussion une autre voie. Nous portons une proposition, fondée sur la conviction de la pertinence du communisme, associant indissolublement une conception renouvelée des conditions de la transformation révolutionnaire, et une stratégie ancrée dans le rassemblement et l’union majoritaire, ancrés dans la dynamique du mouvement social et de la société.

Pour nous, le communisme est au cœur du débat politique sur le changement. C’est à la fois un idéal et l’action pour une société plus juste, plus solidaire, plus démocratique, libérée de la domination des capitalistes. C’est indissociablement une stratégie politique de conquête du pouvoir. Le débat public porte sur le contenu du concept, mais aussi et surtout sur la mise en pratique politique. Cette stratégie appelle une conception renouvelée de la transformation globale pensée au quotidien, de la contestation et du dépassement du capitalisme (loin du « Grand Soir » et du « parti guide »).

Cet objectif, cette conception nouvelle appellent des pratiques, elles aussi, réellement nouvelles, novatrices, à partir des expériences: animation du débat sur les conditions de la transformation révolutionnaire, pour un changement, pour l’égalité réelle, pour un développement écologique, avec au cœur, l’émancipation des individus et la liberté, la reconquête de la souveraineté populaire. Pas dans l’abstrait. À partir du réel (expériences nationales, maîtrise des banques, gestions des entreprises, finalité du travail, économie sociale, démocratie locale, et autres).

Les partis, comme le système institutionnel, sont en crise. Ce qui est en crise, avec les pratiques, c’est la conception de la transformation révolutionnaire, son rapport au mouvement réel de la société. Notre conviction est qu’il faut un parti politique. Une organisation politique héritière du communisme français et porteuse d’une conception profondément renouvelée du communisme. Comme contestation radicale de la domination du capitalisme, pour son dépassement jusqu’à son abolition. Un communisme moderne.

Avec ce mémorandum, volontairement ouvert et à enrichir, nous espérons participer à clarifier les termes du débat et des choix, à l’élargir pour ré-ouvrir une véritable perspective progressiste en France. Dans cet esprit, nous sommes convaincus que se joue une opportunité du communisme français de reprendre une place dans la vie politique de la France.

Le collectif d’animation de communisme-et-politique – 31/05/2018

pour soutenir et s’associer , écrire à communisme-et-politique@gmx.fr

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