Reconquérir notre lucidité

Crise du Covit19 : maintenant et après – LE DÉBAT
L’équipe de Communisme-et-politique a décidé de s’inscrire dans le débat qui sous-tend la crise sanitaire du Covit19 : un débat politique et économique immédiat mais aussi un débat de société à l’échelon national et mondial. Les articles qui suivent n’engagent bien sûr que leurs auteurs.

La pandémie du Covit19 par sa relative rapidité a produit d’abord une « sidération » de beaucoup d’esprits, puis un trop-plein presque de supputations généralement aussi excessives les unes que les autres sur « l’après », qui « ne sera plus pareil », etc… Il en est de même des prévisions économiques catastrophiques produites, soit pour justifier demain une super-austérité, soit pour laisser à penser que le capitalisme va s’écrouler sur ses ruines On a connu ces emballements, amplifiés par l’ultra-médiatisation pour d’autres événements récents (printemps arabe, attentats terroristes, etc…).
Peut-il faut-il prendre un peu de recul, revenir sur le temps long de l’histoire ? Pour cela, il faut être conscient que la crise sanitaire, si elle modifie certains termes du débat politique, n’a pas effacé le contexte général des mois et années précédentes.
En France, ce contexte était marqué par la crise des perspectives offertes par les partis de gauche qui avaient accompagné (ou n’avaient pas pu/su combattre) la gestion de la crise capitaliste (la crise de l’hôpital, le scandale des masques en sont une illustration) et par les partis de droite incapables de sortir le pays de la crise financière et économique de l’après-2018 et aggravant les conditions de vie des salariés. C’est cela qui éclaire l’irruption de Macron (« ni droite-ni gauche ») en 2017 et les hautes eaux du Front national, le mirage du populisme.
Dans ce cadre, il faut mettre aussi l’extrême difficulté dans laquelle se trouve le mouvement social progressiste : échec des luttes syndicales contre la loi El Khomri et échec latent des luttes contre la loi sur les retraites.
Pour le PCF, malgré un congrès de redémarrage et de ré-affirlation, il faut noter les difficultés à revenir au preùier plan, avec un relatif échec du référendum ADP et ceux des référendums mort-nés contre le 49.3 et la loi retraite.
Une remarque : ces luttes sociales se sont caractérisées par des stratégies frontales, de sommet qui se sont vité essouflées face à un adversaire déterminé.
À noter pour la loi retraites que c’est en fin de conflit devant l’essoufflement de la mobilisation qu’on a cherché à multiplier des actions décentralisées, plus inventives dans les formes (et non au début du conflit).
La crise du Covit19 n’a pas effacé cette situation politique contrastée : elle a exacerbé certains mécontentements au risque de favoriser des impatiences militantes très minoritaires pour « l’après », se traduisant par des recherches d’union et de rassemblement à tout prix, d’accords politiques de sommet qui favoriseraient les manoeuvres (Mélenchon, Glucksman et même Olivier Faure) et rejetterait une partie des classes populaires dans les bras de Le Pen.

Pourtant, cette crise sanitaire, si dure pour des millions de salariés est porteuse de deux enseignements dans l’opinion :
– l’envol des dernières illusions dans un large public des capacités àà résoudre la crise l’équipê Macron comme le montre les chiffres de la défiance envers le pouvoir
– l’expérience concrète que le combat contre la pandémie a pu être mené et sera gagné grâce aux personnels de santé et d’abord grâce aux structures publiques, du moins, ce que nous avions pu sauver des différents plans de liquidation. Quelle différence avec le faible rôle du secteur privé !

La constation a sans doute progessé que le « tout marché », le libéralisme donc, peut mettre un pays en situation désastreuse lors d’une grande crise sanitaire et donc qu’il faut une part de maitrise, de souveraineté sur les outils pharmaceutiques et sur les équipements assurant cette sécurité : gĉhis de la liquidation des entreprises fabriquant des masques, de celle des apparails respiratoires (Luxfer à Gerzat en 2018), de celle des hôpitaux de campagne (Giat industrie à Rennes en 1999). Et par voie de conséquence, est-ce que ce ne serait pas également vrai dans d’autres domaines ?

Mais, je crois qu’il faut être conscient que ces opportunités de remise en cause de la démolition industrielle essentielle sont très fragiles et peuvent s’évanouir comme de vagues lueurs du soir devant les manoeuvres politiques ou les initiatives avanturistes.

L’heure n’est pas, me semble-t-il, aux grandes déclarations idéologiques, rédicales seulement en surface tant à l’échelle française qu’à l’échelle mondiale.
Il y a besoin de plus d’action immédiate pour vaincre définitivement la pandémis et pour en sortir en déndant les intérêts des salariés sans sacrifier la démocratie. Il y aura aussi besoin de beaucoup « d’agitation d’idées », un effort d’éducation populaire politique pour faire réfléchir au travers de multiples débats sous toutes les formes possibles sur le besoin en France, en Europe et dans le monde de grandes politiques publique et d’un rôle plus fort de l’état pour le développement des biens communs : santé, eau, environnement, et pour le développement de politiques sociales en matière de salaires, de droits familiaux et démocratiques.

C’est au travers de ces débats en France et dans la multiplication d’initiatives de rencontres et de contacts internationaux très larges qu’il sera possible de faire reculer les idées du libéralisme, de la « libre-concurrence non faussée ». Il faut populariser et faire soutenir les campagnes de la CES (Confédération européenne des syndicats) en Europe, du BIT (Bureau internationale du travail) à l’achelle planétaire, pour un salaire minimum décent, soutenir et donner les moyens à l’OMS pour promouvoir une protection sociale de bon niveau partout dans le monde, obtenir de la France et de l’Union européenne qu’elles financent beaucoup plus les objectifs mondiaux du développement durable de l’ONU.

Là encore, il y aura une « fenêtre de tir » réelle mais courte pour montrer que la mondialisation peut être bénéfique, à condition qu’elle soit résolument sociale et humaine et non financière et militarisée, pour expliquer que la sécurité aujourd’hui est d’abord une sécurité humaie et sociale et non plus militaire.
Si nous ne faisons pas cela, il y a le risque de voir l’opinion se tourner vers des tentations de repli, de souverainisme étriqué, de détricotage du maultilatéralisme, vers des solutions populistes, une protestation stérile comme nous y pousse LFI, ou à la sauce Le Pen dans une impasse tragique, ou dans l’apathie, avec le soutien par défaut à un « ni droite, ni gauche » macronien s’appuyant sur une minorité alors que la majorité des électeurs s’écarterait encore plus de la politique.

Jean Sandétour

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